Avec l’arrivée du 1er mars et les demandes d’admission dans les universités et les collèges québécois, les questionnements de parents pour soutenir leur enfant dans leur choix de carrière sont particulièrement d’actualité. Je ne sais pas si c’est en raison du nouveau contexte de travail, de la recherche d’équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle, ou de nouveaux métiers qui émergent, mais une chose est certaine, les parents sont inquiets. Étant la mère et la belle-mère d’adolescents en questionnement, je fais aussi partie du lot. D’ailleurs, voici deux articles intéressants à ce propos, pour les curieux :
Dans ce texte, je vous fais part de mes réflexions et je vous présente aussi les conseils de deux collègues conseillers d’orientation (c. o.) avec qui j’ai échangé pour vous fournir des conseils plus complets, qui couvrent tous les angles. Il ne tiendra qu’à vous de vous faire une tête et de voir ce qui vous convient comme piste et de décider ce que vous pourriez mettre en application pour aider vos jeunes à faire de bons choix de carrière.
Les questions que j’ai posées à mes deux collègues qui travaillent dans des écoles secondaires étaient : comment aider nos adolescents et nos jeunes adultes à faire des choix pertinents, qui leur conviennent vraiment? Comment accompagner un adolescent ou un jeune adulte dans son choix de carrière avec toutes les remises en question par rapport au monde du travail actuel? Comment comprendre et découvrir les métiers traditionnels ou complètement nouveaux qui s’offrent à eux? Comment les aider à faire un choix sans le faire pour eux?
J’ai d’abord rencontré Jean-François Perron, conseiller d’orientation et superviseur du programme de hockey à la polyvalente de L’Ancienne-Lorette. Jean-François étudie actuellement l’indécision à l’adolescence et il est le récipiendaire de la Bourse d’excellence pour c. o. doctorant 2021, pour son projet de recherche « Étude sur les liens entre l’indécision scolaire et professionnelle et le développement des fonctions cognitives à l’adolescence ». Jean-François raconte qu’un jeune entre 12 et 17 ans n’est peut-être pas si prêt que ça biologiquement à prendre des décisions éclairées dès la sortie de son secondaire. Il étudie le fait qu’un jeune de cet âge n’est peut-être pas encore en mesure cognitivement de faire un choix si aisément qu’on pourrait le croire. Il me mentionne que, selon Statistique Canada et une étude longitudinale, seulement 10 % des jeunes ont gardé une cohérence dans leurs aspirations professionnelles entre 15 et 25 ans (source : Tendances liées au choix de carrière de jeunes Canadiens et les études postsecondaires qui lui sont associées).
Jean-François travaille dans une école où il est aussi superviseur du programme hockey. Qu’il s’agisse de sport-études, d’art-études ou même d’éducation internationale, des modèles à suivre à l’intérieur de ce type de programmes et un sentiment d’appartenance au groupe aident les jeunes à poursuivre leurs études. Il faut savoir aussi que les participants à ces programmes sont volontaires. Leur passion pour leur sport ou leur art est la « carotte au bout du bâton ». Les études s’inscrivent donc comme une évidence pour eux, et non pas comme une contrainte.
Quels sont alors ses suggestions ou ses conseils pour aider les parents de jeunes en fin de secondaire dans leur choix de carrière?
Dans l’un de mes articles sur les talents, je traitais de la loi de la délicieuse incertitude? Nous sommes revenus sur le sujet. Nous sommes d’accord qu’il importe de faire vivre des expériences stimulantes, sans mettre trop de pression sur la performance, à nos jeunes. Bref d’avoir de saines ambitions.
En ce qui a trait aux métiers de demain, les conseils et les recommandations de Jean-François sont simples : amener nos jeunes à s’ouvrir à la technologie, à apprendre les langues et à adopter une approche multidisciplinaire ouverte sur le monde.
J’ai ensuite interviewé une amie de longue date et consœur universitaire, Jasmine Sirois, aujourd’hui conseillère d’orientation à l’École secondaire Saint-Joseph de Saint-Hyacinthe. Au départ, notre discussion s’est axée sur l’anxiété des parents : la différence entre nos désirs et la réalité et le réalisme des choix de nos enfants. On a beau rêver que nos enfants étudient en médecine ou deviennent de grands professionnels sportifs, il faut que ce soit aussi leur choix ou leur rêve. C’est long une vie quand on est malheureux dans sa carrière. Même si ce choix ne semble pas parfait à vos yeux, l’est-il aux yeux de votre adolescent ou jeune adulte? Est-il en lien avec ce qui le passionne vraiment et avec ses compétences ou aptitudes réelles?
Jasmine recommande aussi aux parents d’amener leurs enfants à apprendre à prendre des décisions. Elle me fait la remarque que trop souvent, nos jeunes n’ont même jamais appris à prendre une décision toute simple, comme choisir une activité parascolaire. S’ils ne sont pas en mesure de faire des choix simples dans leur quotidien, comment peut-on leur demander de faire un choix aussi important qu’une carrière à la fin du secondaire? Les parents comblent trop souvent les « trous » en prenant des décisions pour leurs jeunes pour pallier l’incertitude qui les habite quant à leur avenir. Rappelons-nous qu’il n’y a pas de bons ou de mauvais choix, que des choix différents.
Dans ses rencontres de gestion de carrière avec les étudiants de son école, Jasmine me raconte que les parents sont souvent surpris par les réponses de leur propre ado à ses questions. Elle entend souvent des commentaires comme : « Ah oui! Tu aimes ça, toi, telle ou telle matière! Je ne savais même pas! » Elle recommande aux parents de s’intéresser à ce que l’école fait avec les jeunes, et de les aider à découvrir le monde du travail. Elle les invite à explorer avec leur jeune les métiers et les études reliées à chacun d’eux. Il est vrai que ce n’est pas toujours facile à faire, car nos adolescents peuvent parfois sembler fermés à l’échange. N’oublions pas comme parent que notre jeune ne se sent peut-être pas assez solide dans sa démarche pour partager ses inquiétudes ou ses questionnements. Un moment clé à saisir pour échanger avec nos jeunes est quand on est seul avec eux en voiture. Vous savez, lors de nos innombrables taxis parentaux!
Jasmine me donne des exemples de façons d’aider nos jeunes dans leur processus de choix de carrière. Elle recommande de les accompagner dans leur réflexion en leur faisant faire ou vivre différentes activités, comme des expériences de travail, du bénévolat, des activités parascolaires et toute autre expérience qui leur permettraient de mieux se connaître. Elle encourage les jeunes à participer à des portes ouvertes virtuelles ou en présentiel, des journées d’élèves d’un jour, du mentorat virtuel, des activités de jeunes explorateurs et d’établir des contacts avec des professionnels qui exercent la profession de leur choix. C’est ce qu’elle appelle des visites exploratoires.
Trop souvent, elle constate que les jeunes ne savent même pas ce que leurs propres parents font comme métier. Elle nous invite à discuter davantage de notre travail avec eux. Elle nous invite aussi à respecter le rythme du jeune. Elle constate énormément d’anxiété chez nos jeunes, peut-être en lien avec le nombre de choix possibles de nos jours ou par manque d’expérience tout simplement. Jasmine entend souvent des jeunes dire : « il ne faut surtout pas que je me trompe dans mon choix de carrière », comme si leur choix était fait pour la vie, alors que nous savons très bien que nous pouvons avoir plus d’une carrière et que l’évolution nous amènera à évoluer et donc à faire d’autres choix.
Car si l’on est réaliste et qu’on s’amuse à faire une ligne du temps professionnel, on constate que nous avons une bonne quarantaine d’années devant soi au travail (si ce n’est pas plus)! Alors, pourquoi ne pas couper en petites bouchées nos choix professionnels? Par mon expérience, je constate que plus on étudie longtemps, plus on risque de garder le même métier toute sa vie, peut-être de changer de secteur d’activité ou d’employeur, mais de garder sa profession plus longtemps. Et si l’on étudie moins longtemps, on peut faire plus facilement et plus souvent des virages à 180° dans sa carrière. Alors, pourquoi ne pas morceler un peu nos choix et nous dire que nos jeunes pourraient faire de même?
Elle souligne l’importance de l’entonnoir de la prise de décision étudié à l’université dans notre programme de formation. De mon côté, j’aime beaucoup utiliser le concept japonais Ikigai avec ma clientèle en leadership, qui permet de trouver sa raison d’être pour aider à faire un choix.
Jasmine nous rappelle que, comme parents, nous avons un impact sur nos adolescents. Ils nous écoutent, même s’ils prétendent ne pas le faire! Effectivement, elle entend régulièrement dans son bureau un jeune lui dire : « ma mère m’a dit que j’ai telle ou telle compétence… » OU « mon père m’a dit que ce métier avait de l’avenir… » Ils nous écoutent bien plus qu’on ne l’imagine, et je nous rappelle ici qu’ils apprennent comme des éponges! Alors, même si l’on pense qu’ils ne nous écoutent pas vraiment, peut-être qu’il vaut la peine de parler davantage avec nos ados à table, autour d’un bon repas de famille. Qu’a-t-on à perdre?
Pour conclure, Jasmine nous offre quelques sites Web à visiter seuls ou avec nos enfants, afin de les aider à explorer :
▪️ Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec
▪️ Service régional d’admission du Montréal métropolitain
▪️ Service régional d’admission au collégial de Québec
▪️ Service régional de l’admission des cégeps au Saguenay-Lac-St-Jean
▪️ Admission FP (formation professionnelle)
▪️ Inforoute FPT (formation professionnelle et technique)
▪️ Septembre éditeur (outils, contenus et expertises, par et pour le monde du travail)
Bref, ces deux conversations m’ont permis de vous fournir toutes ces informations. Pour récapituler le tout en trois étapes simples, je vous dis :
1. Faites faire un test de connaissance de soi à votre jeune (grâce à une rencontre avec un c.o. de son école ou au privé) et discutez-en avec lui. Servez-vous du principe de l’entonnoir ou du concept japonais Ikigai pour ouvrir une conversation avec lui.
2. Amenez-le à se trouver différents emplois étudiants pour explorer le marché du travail et développer des compétences autres qu’académiques.
3. Organisez-lui des visites exploratoires via son école ou votre réseau de contacts et faites un retour sur le sujet avec lui.
Bien évidemment, je vais me servir de ces conseils avec mes propres adolescents et je vais surtout leur rappeler que pour faire un choix éclairé, il faut oser vivre des expériences et explorer de façon consciente et sécuritaire à leur âge.
Pour terminer, je me permets de vous partager le proverbe suivant que mon amie Jasmine utilise dans ses présentations aux parents : « Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible. » Antoine de Saint-Exupéry
Passionnée par le contact avec les gens, elle conçoit, anime et diffuse des formations auprès de leaders d’entreprise depuis une vingtaine d’années.
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