Droit du travail, Non catégorisé
Antécédents judiciaires et embauche
Toutes les organisations l'ont déjà vécu : vous rencontrez le candidat parfait en entrevue, les références sont bonnes, mais voilà que les vérifications d'antécédents judiciaires révèlent un antécédent.
Est-ce que la candidature doit ou peut être écartée? Qu'en est-il lorsque vos employés évoluent avec une clientèle vulnérable?
La Charte des droits et libertés de la personne, à son article 18.2, prohibe la discrimination à l'embauche en raison d'antécédents judiciaires qui ne sont pas reliés à l'emploi ou en lien avec lesquels un pardon a été obtenu :
18.2. « Nul ne peut congédier, refuser d’embaucher ou autrement pénaliser dans le cadre de son emploi une personne du seul fait qu’elle a été déclarée coupable d’une infraction pénale ou criminelle, si cette infraction n’a aucun lien avec l’emploi ou si cette personne en a obtenu le pardon. »
Déterminer si un antécédent a un lien avec l'emploi pour lequel le candidat postule est un exercice de jugement délicat, surtout en présence d'un crime sérieux, récent, qui a entraîné une peine d'incarcération prolongée.
À l'opposé, certaines infractions ne seront clairement pas en lien et ne devront pas être considérées comme pertinentes. Prenons l'exemple d'un antécédent de conduite avec faculté affaiblie, alors qu'un candidat sollicite un emploi de bureau.
Une décision récente est venue rappeler aux employeurs qu'en cas de zone grise, il est important de discuter avec le candidat des antécédents en question, surtout s'ils datent de plusieurs années.
C'était le cas dans l'affaire Charruau c. Domaine Lanaudière (9218-7707Québec inc.), 2024 QCTDP 12 (https://www.canlii.org/fr/qc/qctdp/doc/2024/2024qctdp12/2024qctdp12.html?resultId=c1c23db8afab4cf9ad57b4617fff1118&searchId=2024-09-
Dans cette affaire, le candidat, après avoir pris sa retraite de ses fonctions en conciergerie occupées dans une école, sollicitait un poste de Chef de la maintenant dans une résidence de personnes âgées.
Dans le cadre du processus d'embauche, la recherche d'antécédents a révélé que le candidat avait déjà plaidé coupable plus de 30 ans auparavant à une accusation de voie de faits. Il avait reçu une absolution conditionnelle à l'accomplissement de travaux communautaires et deux ans de probation, et n'avait donc pas de casier judiciaire à l'issue du processus.
Dans son analyse, le tribunal rappelle que l'appréciation du lien entre l'infraction et l'emploi est essentiellement contextuelle et appelle à considérer :
En l'espèce, l'employeur n'a pas prétendu qu'il y avait un lien entre l'emploi et les antécédents, mais plutôt que le refus d'embauche était lié uniquement à ses compétences.
Cependant, le déroulement du processus d'entrevue, soit une entrevue en personne après une entrevue téléphonique, en plein contexte pandémique, ne supportait pas cette version des faits.
Face à une preuve contradictoire sur les motifs énoncés au moment du refus d'embauche, le tribunal a retenu la version du plaignant, à l'effet que le représentant de l'employeur lui avait dit que les ressources humaines bloquaient l'embauche suite aux vérifications d'antécédents.
Le tribunal a conclu que le refus d'embauche s'inscrivait en violation de l'article 18.2 de la Charte susmentionné et a condamné l'employeur et le Groupe dont il fait partie (et dont le service RH lui donnait les instructions d'embauche) à verser des dommages moraux et punitifs au candidat.
Conseillère en ressources humaines agréée, Katherine conseille et représente les organisations de tous les secteurs d'activité.
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