Un employeur peut-il mettre en place un système d’alerte informatique l’avertissant quand des employés parlent de lui sur les médias sociaux?
Dans l’affaire : Le syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 574 c Librairie Renaud-Bray inc., 2017 CanLII 1695 (QC SAT), l’arbitre André Sylvestre s’est penché sur la prérogative de l’employeur de mettre en place une veille informatique lui permettant d’identifier lorsque des usagers des médias sociaux publient un contenu comprenant son nom.
Le syndicat alléguait que l’employeur s’en servait pour monitorer les publications de ses employés, notamment les articles de journaux que ceux-ci rediffusaient, dans un contexte où l’employeur avait exigé la neutralité de ses employés en ce qui concernait leur position face aux revendications étudiantes qui battaient leur plein (les « carrés rouges »).
Lors de l’audition, il fut plutôt mis en preuve par l’employeur qu’il ne s’agissait pas d’un tel système de monitorage surveillant les publications des employés, mais bien uniquement un système ratissant le Web afin d’identifier toute publication en général, quel qu’en soit l’auteur, comprenant le nom de l’employeur.
L’arbitre en conclut qu’un tel monitorage n’est pas ciblé ni illégal et en a rejeté le grief.
Cependant, bien que la décision n’en parle pas, si l’employeur désirait monitorer systématiquement les publications de ses employés par l’entremise des médias sociaux, son droit de gérance se heurterait à la liberté d’expression des employés et au respect de leur vie privée (pour le contenu verrouillé). L’employeur devrait donc démontrer que ce monitorage est mû par un motif raisonnable. Par exemple, l’application d’une loi d’ordre public ou d’obligations déontologiques d’un professionnel pourrait militer en ce sens.
Citons l’exemple d’un avocat puni par le Barreau de l’Ontario dans l’affaire récente
Law Society of Ontario v. Forte, 2019 ONLSTH 9 (CanLII). Le professionnel n’a pas monitoré la page Facebook de sa stagiaire, qui y diffusait des propos dérogatoires sur les clients et les officiers du palais de justice, en plus d’y divulguer de l’information confidentielle sur les clients. L’avocat lui avait également demandé d’entretenir le compte Twitter du cabinet, sans pour autant surveiller les publications qui y figuraient. Il fut mis à l’amende. C’est donc à dire que lorsque la surveillance vise la mention de la marque de l’employeur auprès du public en général ou lorsque l’employeur possède un motif raisonnable de monitorer le contenu diffusé, de telles alertes pourraient être implantées.
Conseillère en ressources humaines agréée, Katherine conseille et représente les organisations de tous les secteurs d'activité.
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