Je commence mon article avec des statistiques. Je sais, c’est une mauvaise entrée en matière pour susciter votre intérêt... mais promis, ce seront les seules.
Selon l’ESAC (Entertainment Software Association of Canada), même si 37 % des Canadiens se définissent comme joueurs (jeux vidéo, jeux en ligne), 52 % avouent avoir joué dans les 4 dernières semaines (51 % hommes et 49 % femmes). Chez les 18-34, le chiffre grimpe à 67 %.
Bienvenue dans l’ère de la « gamification » et de la ludification!
Qu’est-ce que la « gamification »? C’est un néologisme de langue anglaise qui désigne le fait de reprendre des mécaniques et signaux propres aux jeux, et notamment aux jeux vidéo, pour des actions ou applications qui ne sont pas à l’origine des jeux. On utilise donc les techniques du jeu pour créer et renforcer l’engagement et/ou provoquer des actions.
En marketing, on l’utilise de plus en plus pour atteindre ses cibles. Le but de la « gamification » est de rendre une action plus ludique, de favoriser l’engagement de l’individu qui y participe et d’introduire éventuellement une dimension virale. Ça ne vous parle pas ça? Il me semble que cela s’applique bien au recrutement non? Et si nous traitions nos candidats comme des joueurs?
Considérant donc que presque une personne sur deux joue régulièrement à des jeux, avec un âge moyen de 36 ans, notre cible s’y trouve forcément!
J’y vois deux utilités possibles; une d’attraction, et une d’analyse:
● Attraction : Augmenter l’engagement
Les joueurs ne s’intéressent pas à la publicité (dite native). En plus, comme ils sont pour la plupart technophiles, ils sont capables de bloquer ces annonces avec des « adblockers ». Donc toute annonce classique d’emploi ne les interpelle pas.
En France, Renault, dans le secteur automobile, a lancé récemment un mini jeu de recrutement en présaison de la Formule 1. Les internautes ont été invités à répondre à plusieurs questions posées par un « Chatbox ». Le logiciel a pu déterminer par la suite la spécialisation du joueur (technicien, mécanicien...) puis le gagnant. Ce fut au final un moyen de se créer une banque de candidats experts et probablement plus passionnés que la moyenne de leurs candidatures reçues par voie traditionnelle d’affichage.
Ce que l’on souhaite, c’est de proposer du contenu, et de susciter l’intérêt. Dans un autre ordre d’idées, une publicité pour une automobile a proposé de tester ladite voiture et de faire une course. Ont pu être mis en avant les atouts de celle-ci plutôt que de les montrer en photo ou en vidéo. Pourrions-nous faire la même chose avec un poste avec une simulation de l’environnement de travail? L’important est de créer une émotion. On le sait, les souvenirs accompagnés d’une émotion forte sont davantage retenus.
● Analyser nos candidats
« On peut en savoir plus sur quelqu’un en une heure de jeu qu’en une année de conversations »
Et non, ce n’est pas une citation récente, c’est de Platon.
On distingue plusieurs types de joueurs. Richard Battle, designer de jeux vidéo, auteur, chercheur britannique et docteur en intelligence artificielle a été le premier à avoir essayé de catégoriser les joueurs en 1996. Il a contribué à théoriser et donc à connaître qui sont nos utilisateurs, et comment adapter notre stratégie à notre cible.
Il a alors distingué 4 types de joueurs :
- Les « Fighters » : goût prononcé pour la compétition, ils cherchent avant tout à affronter les autres.
- Les « Achievers » : ils veulent devenir meilleurs, avoir des objectifs. Ils se donnent pour but de finir le jeu le plus vite possible et de terminer toutes les quêtes. On considère qu’ils sont les plus faciles à gérer bien sûr.
- Les « Socializers » : plus courant (40 %). Leur intérêt est d’interagir avec les autres, d’agir dans le bien-être commun et en accord avec l’univers du jeu.
- Les « Explorers » : plus rares, il leur faut des jeux hypercréatifs. Ils sont intéressés par le monde dans lequel ils évoluent, ils visitent tous les recoins, explorent. Plus exigeants, ils sont plus difficiles à gérer.
Pourquoi ne pas essayer d’attirer les candidats par le jeu, et de s’en servir par la même occasion pour déterminer leur type et ainsi orienter leur candidature et mieux comprendre leurs mécanismes?
La « gamification » prend sa place. On voit quelques startups se lancer dans ce secteur. Par exemple, Origamix RH qui s’est spécialisée dans le développement des jeux à des fins de recrutement. Sous une autre forme, on voit aussi de plus en plus de hackathons organisés dans le même objectif par des entreprises. Agorize entre autres s’est spécialisée dans ce service. Hunterz de son côté a développé une plateforme sous forme de parcours ludique pour favoriser le référencement à l’interne...
Alors, on joue?
**Merci à Dominique Mangiatordi de Tapptic d’avoir inspiré cet article suite à sa conférence sur la « gamification »
Sandrine est formatrice sur les techniques de sourcing et nouvelles technologies appliquées au recrutement, consultante en recrutement pour les grandes entreprises, les PME et les OBNL. Elle est blogueuse et organisatrice de #trumontreal, « non » conférence sur le recrutement à Montréal (10e édition en 2022).
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