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La honte: un frein à la sécurité psychologique

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Pascale Dufresne 6 juin 2023

Dans le monde des affaires d’aujourd’hui, la reconnaissance de l’importance d’un environnement de sécurité psychologique est de plus en plus répandue. Amy Edmondson, professeure à Harvard, définit un environnement sécuritaire comme un lieu où la peur et la honte ne dominent pas, où les individus n’ont pas besoin de dissimuler leurs erreurs de peur d’être jugés ou punis.

Lorsque nous nous sentons psychologiquement en sécurité au travail, nous sommes prêts à admettre nos lacunes dans certains domaines et à reconnaitre notre expertise dans d’autres. Les employés qui se sentent en sécurité sont motivés par l’apprentissage, l’excellence et des connexions authentiques, plutôt que par le besoin de projeter une image parfaite.

Nous aspirons tous à un tel environnement, mais en tant qu’êtres humains, nous sommes également sujets à des comportements qui peuvent malheureusement contribuer à la création de la honte qui est un des premiers freins à la sécurité psychologique.

 

La honte : un obstacle majeur à la sécurité psychologique

Quelques faits inspirés des travaux de Brené Brown dans son livre « Dare to Lead » :

  • nous ressentons tous de la honte. C’est l’une des émotions les plus primitives que nous expérimentons en tant qu’êtres humains. Les seules personnes qui ne peuvent pas ressentir la honte sont celles qui ne sont pas capables d’empathie ou de créer des liens humains (sociopathes);
  • nous avons tous peur de parler de la honte. Le simple mot est inconfortable;
  • moins nous parlons de la honte, plus elle exerce de contrôle sur nos vies;
  • la honte se présente sous deux formes principales : 1) Le sentiment de ne jamais être assez bon. 2) « Pour qui te prends-tu? ».

 

« La honte est le sentiment ou l’expérience intensément douloureux de croire que nous sommes imparfaits et donc indignes d’amour, d’appartenance et de connexion. » Brené Brown

 

Faire la différence entre la culpabilité et la honte

Il est important de faire la différence entre la culpabilité et la honte.

Toujours selon les travaux de B. Brown :

  • La culpabilité : « J’ai fait quelque chose de mauvais. »
  • La honte : « Je suis mauvais.e »

 

La culpabilité est inconfortable, mais elle peut être positive. Elle nous indique que nous avons fait quelque chose d’immoral ou qui n’est pas en lien avec nos valeurs. Elle peut donc nous aider à nous améliorer et à grandir.

La honte, quant à elle, n’est, la plupart du temps, pas accompagnée de compassion et est destructrice. Elle s’attaque à la partie de nous qui croit que nous sommes en mesure de changer, de devenir meilleur.

Les recherches en neurosciences démontrent que la honte inflige une douleur et un sentiment de rejet aussi réels que la douleur physique. Une étude de l’Université de Californie utilisant l’imagerie cérébrale a révélé que les zones cérébrales activées lors de la douleur physique sont également activées lors de la honte et de l’exclusion sociale. Ainsi, la honte a un impact profond sur notre bien-être émotionnel et notre santé mentale, pouvant affecter durablement la confiance en soi, l’estime de soi, la motivation et les relations interpersonnelles.

 

Les comportements qui créent de la honte dans les milieux de travail

Parfois, inconsciemment, nous pouvons adopter des attitudes qui renforcent un climat de honte. La pression de se conformer aux normes sociales, la compétition intense, l’éducation préalable ou les expériences passées peuvent nous conduire à adopter ces comportements :

  • ridiculiser ou humilier publiquement;
  • ignorer ou minimiser les réalisations ou les idées d’une personne;
  • utiliser la critique destructive : des commentaires et des critiques formulés de manière blessante, voire abusive;
  • pratiquer le blâme et la stigmatisation;
  • discriminer ou harceler;
  • manquer d’offrir du soutien émotionnel;
  • invalider les émotions.

 

Ces mots qui créent de la honte

« Tu es si sensible », « Je ne savais pas que tu étais si fragile », « Tu es tellement défensif », « Je suppose que je devrai maintenant surveiller tout ce que je dis autour de toi », « Tout est dans ta tête », « Tu sembles vraiment hostile », « Je ne sais pas comment tu as pu faire une telle erreur. C’est vraiment stupide. » « Tout le monde devrait savoir ça à ce stade. », « Ne sois pas si susceptible, c’était juste une blague », « Arrête de prendre les choses autant à cœur », « Je te pensais meilleur.e que ça. », « Je ne peux même pas compter sur toi pour faire une seule chose correctement », « Tu devrais être gêné.e de ce que tu as fait. ». « Tu es vraiment nul.le. » « Je suis désolé.e que tu traverses une période difficile, mais nous avons tous des problèmes ».

 

Les antidotes de la honte :

  • Avoir le courage d’en parler : La honte déteste être mise au grand jour et elle a plus de chances de se dissiper lorsqu’on parle d’elle. Ne demeurons pas des spectateurs et dénonçons les paroles et comportements qui créent de la honte et dont nous sommes témoins.

 

  • La compassion : La honte, comme le dit Brené Brown, est une émotion sociale alors quoique l’autocompassion peut nous aider à traverser l’adversité et être importante pour la guérison, nous avons besoin aussi d’empathie et de compassion des autres. La honte se créée socialement et se guérit socialement.


  • De la honte à la promotion d’une culture de l’apprentissage : Valoriser l’apprentissage et le développement, reconnaitre les erreurs comme des occasions d’apprentissage plutôt que comme des sources de honte ou de blâme, favoriser la collaboration, le partage des connaissances et le soutien mutuel et finalement, célébrer les succès, les efforts et les tentatives d’innovation.

 

En tant que leader, il est crucial de reconnaitre les effets néfastes de la honte et de travailler activement à créer une culture où la honte est minimisée.

La prise de conscience de ces comportements et de leurs conséquences constitue un point de départ pour les changer positivement. En reconnaissant notre propre rôle dans la création de la honte et en travaillant activement à favoriser un environnement de soutien, d’acceptation et de compassion, nous pouvons contribuer à créer un espace où les individus se sentent en sécurité pour partager leurs idées, reconnaitre leurs erreurs et collaborer librement.

La honte ne devrait pas avoir sa place dans nos lieux de travail. Chaque personne devrait pouvoir se dire : « Je suis assez. Je suis digne d’appartenance et de connexion. ».

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