Nous connaissons tous la légende d’Icare, ce personnage mythologique dont la soif de liberté et la volonté de s’élever toujours plus haut brûlèrent ses ailes, causant par le fait même sa chute et sa perte.
L'entrepreneuriat est certes une aventure passionnante; rêver d’un monde meilleur, de transformer la société ou d’actualiser une vision sont des processus très grisants. Voir croître son entreprise, vivre des réussites et être reconnu.e comme entrepreneur.e est grandement valorisant.
Cependant, derrière une image de l’entrepreneuriat souvent idéalisée se cachent des défis et des pièges considérables.
Entretenir des attentes de croissance continue, de performance inaltérée peu importe le contexte, et ce, sans jamais prendre soin de soi, c’est faire comme Icare; c’est viser le soleil, rien de moins, et se brûler corps et âme en chemin.
Tout comme ce personnage mythique et ses ailes exceptionnelles, les entrepreneurs possèdent des caractéristiques qui constituent des facteurs de protection en matière de santé psychologique, mais qui peuvent devenir des facteurs de risques si des précautions ne sont pas mises en place.
Les entrepreneurs choisissent bien souvent l’entrepreneuriat pour avoir le contrôle sur leur propre destinée. Prendre ses propres décisions, choisir librement ses actions et pouvoir prendre des initiatives sont des facteurs de protection reconnus et favorables à la santé psychologique. Cependant, une volonté d’autonomie excessive, au point de ne pas oser demander du soutien et de l’aide lorsque besoin peut devenir un réel danger.
Malheureusement, le mythe moderne de l’entrepreneur superhéros nous amène dans un scénario très semblable à celui d’Icare qui n’a pas voulu tenir compte des conseils des autres lui recommandant de ne pas voler trop haut ni trop près du soleil. L’entrepreneur.e qui ne s’entoure pas, qui essaie de tout faire lui-même et qui ne demande jamais de soutien augmente considérablement les risques d’outrepasser ses limites, de s’épuiser et de vivre de la solitude.
Doser sainement cette capacité d’autonomie et d’initiative est essentielle à l’équilibre. Pourquoi ne pas joindre un cercle de pairs pour discuter de sa réalité entrepreneuriale, consulter un mentor en affaires, lire un livre sur le récit d’un entrepreneur qui a su bien s’entourer, reconnaître ses zones d’incompétence et déléguer ou parler à des amis de confiance lorsqu’on en ressent le besoin?
L’important, c’est de ne pas rester seul.e.
L'engagement passionné envers son travail est certes une caractéristique commune à de nombreux entrepreneurs.es. Travailler avec enthousiasme et dynamisme, se sentir investi d’une mission qui a du sens pour soi et avoir envie de se lever chaque matin pour réaliser celle-ci contribuent à favoriser le mieux-être. Cependant, lorsque cet engagement devient excessif, il peut devenir un facteur de risque pour la santé psychologique.
Selon le Guide sur la santé et le bien-être des entrepreneur(e)s de l’Institut d’entrepreneuriat BNC et HEC Montréal, 87% des entrepreneurs sentent que leur entreprise fait partie de leur identité et 94% d’entre eux affirment que la plupart de leurs intérêts sont centrés sur leur entreprise.
Or, la santé et l’équilibre viennent de la capacité à investir et nourrir l’ensemble des sphères de notre vie. Un engagement et une passion qui dévorent finissent par laisser peu de place à autre chose. Tout comme Icare qui était obnubilé par le ciel, les entrepreneurs.es qui ne parviennent pas à établir des frontières claires entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle risquent de s'épuiser rapidement.
Ceux et celles qui arrivent à se doter de mécanismes de saine déconnexion du travail voient en général des résultats bienfaisants rapidement.
Et qui dit déconnexion ne dit pas abandon! Pour bien des entrepreneurs.es, le fait d’oser fermer son cellulaire quelques heures la fin de semaine, de prendre une pause repas sans répondre à des courriels ou de pratiquer un loisir pendant 30 minutes sans sa montre intelligente vient avec la peur de manquer quelque chose ou de ne pas être là pour ses employés s’ils ont besoin d’eux.
Mais au contraire. La capacité à être vraiment présent à l’autre, ou à son travail, est proportionnelle à la capacité à se soustraire des stimulations excessives.
La capacité à demeurer optimiste malgré les épreuves, à persévérer devant les obstacles, à agir avec énergie et à percevoir des opportunités là où peu les entrevoient est définitivement un rempart contre le désespoir que de nombreux entrepreneurs.es possèdent.
Avoir une vision positive du monde et de la vie qui nous entoure est favorable au mieux-être. Les personnes optimistes ont généralement de multiples ressources pour demeurer en bonne santé psychologique.
Mais lorsque la capacité de persévérance se transforme en acharnement, que l’enthousiasme migre vers un éparpillement et que l’optimisme devient idéalisme, voire irréalisme, des problèmes vont éventuellement émerger. Lorsqu’on devient incapable de prendre du recul, de lâcher-prise ou de reconnaître les signes indiquant qu’on a besoin de repos, le rempart se transforme en astre brûlant et on risque d’y perdre bien plus que quelques plumes.
On accorde souvent beaucoup d’attention à la saine gestion des émotions dites désagréables (peur, colère, tristesse). Mais il s’avère tout aussi crucial de savoir bien gérer les émotions agréables (joie, enthousiasme, excitation). Des émotions de ce type trop intenses et mal canalisées peuvent aussi mener à des enjeux de santé psychologique.
Pour rester en équilibre, il faut savoir reconnaître les signaux qui indiquent le besoin de se reposer et prendre un temps d’arrêt. Il est important d’apprendre à discerner les actions qui ont du sens et de l’impact, au-delà de notre plaisir à les réaliser, afin de mieux prioriser et éviter la surcharge. Et il est crucial de développer une vigilance afin d’identifier la ligne à ne pas franchir, celle où l’optimisme devient malsain.
La légende d’Icare est un mythe, tout comme l’entrepreneur.e superhéros moderne. L’équilibre s’établit toujours par le biais d’une approche et d’une compréhension réalistes de soi-même. Se servir sainement de ses ressources personnelles peut mener loin, tant qu’on ne vise pas le soleil à tout prix.
« Nos bâtisseurs portent en eux l'espoir d'un monde enrichissant, stimulant et prospère. Les soutenir afin qu'ils puissent poursuivre cette quête tout en demeurant en santé est le moteur même de ma mission. »
Facteur H est un espace convivial de référence francophone en ressources humaines pour rester à l’affût des nouvelles tendances et trouver des solutions concrètes et applicables aux défis organisationnels d’aujourd’hui et de demain.