Embaucheriez-vous une personne analphabète dans votre équipe RH? J’en doute fort. Comment cette personne pourrait-elle être en mesure de bien faire son travail? Eh bien, c’est la même chose avec les chiffres, les données. Pourquoi embaucheriez-vous un professionnel RH qui ne comprend pas les chiffres? Cela ne veut pas dire que vous devez chercher des professionnels RH experts en statistiques ou en modélisation. Mais, ils doivent connaître la base!
Quand on parle de bâtir de solides compétences en analytique RH, les organisations ont tendance à concentrer leurs efforts sur le développement des talents de l’équipe d’analytique RH (ou la personne qui porte le chapeau de l’analytique dans l’organisation). Bien que ce soit très important d’avoir une équipe d’analytique compétente, je pense qu’il ne faut surtout pas négliger la littératie des données de base de TOUTE l’équipe RH.
Mais qu’est-ce que veut dire littératie? La définition de l’OCDE est la suivante : c’est l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses connaissances et ses capacités. Donc, qu’est-ce que je veux dire quand je parle d’avoir une base en littératie des données en RH? Je veux simplement dire être à l’aise avec les chiffres. Être familier avec les concepts de base de la statistique comme la définition d’un échantillon représentatif, la différence entre corrélation et causalité, être en mesure d’analyser et d’explorer les données sous différents angles et de pouvoir comprendre les différentes sources de données et formats de données. Je fais face toutes les semaines (j’ai manqué dire tous les jours, mais ce serait un peu exagéré) à des professionnels RH qui ne comprennent pas bien les concepts de moyenne, de médiane et d’écart type… Améliorer la littératie des données en RH, ne veut pas dire que l’on doive transformer les professionnels RH en scientifiques de données.
Il ne faut pas se mettre la tête dans le sable, la profession RH a des croûtes à manger et du temps à rattraper. Selon Josh Bersin, dans 60 % des organisations, le service RH n’a pas les compétences ÉLÉMENTAIRES pour faire de l’analyse de données. Avoir une pensée analytique est une compétence cruciale, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, lorsqu’un professionnel RH rencontre un problème, s’il a une base solide en littératie des données, il aura tendance à poser les bonnes questions. Il sera en mesure de mieux cerner le problème plutôt que de tomber directement en mode solution. Les autres fonctions de l’organisation critiquent souvent les RH sur leur tendance à être en mode solution sans avoir bien compris le problème. De plus, les professionnels RH qui maîtrisent bien les bases de l’analytique auront tendance à plus facilement partager les découvertes faites par l’équipe d’analytique RH avec le reste de l’organisation.
Une recherche de Bersin (1 ) a été en mesure de démontrer que le niveau de littératie de base parmi la population RH d’une organisation (excluant l’équipe d’analytique RH) est un prédicteur de la maturité d’une organisation. Vous voulez que votre organisation progresse dans l’analytique RH? Vous devriez investir dans les compétences de TOUTE l’équipe RH. Mais comment s’y prendre?
1. La fonction RH doit adopter une mentalité orientée sur la performance et les faits. Il faut habituer les professionnels RH à demander et à chercher des faits… Il faut les habituer à poser les bonnes questions, il faut leur apprendre à investiguer.
2. Vous devez leur donner accès à des formations qui leur permettront de mieux comprendre l’utilité de l’analytique. Il est important de faire une distinction entre l’analytique avancée et l’analytique opérationnelle. Il faut les intéresser à l’analytique opérationnelle (celle que l’on peut utiliser tous les jours), et ce, avec des exemples concrets qui sont liés à leur travail quotidien. Si le contenu des formations n’est pas en lien direct avec leur travail, vous ne réussirez pas à les intéresser. Vous pourriez développer des vidéos, des podcasts ou encore mettre en place une communauté de pratique de l’analytique dans votre organisation. On ne fera pas d’eux des experts, mais on développera un appétit pour les indicateurs et les données.
3. Pour aller un peu plus loin, vous pourriez mettre en place un curriculum de cours qui comprendrait, entre autres, les thèmes suivants :
. La pensée analytique et la résolution de problème;
. L’analyse d’affaires et statistiques;
. La collecte de données;
. Les outils de suivi et d’analyse;
. La communication efficace;
. Le sens des affaires et des finances;
. La planification stratégique;
. Le « storytelling » et la visualisation
4. Finalement, vous pourriez leur demander de bâtir des études de cas lorsqu’ils vous présentent des projets RH. Bâtir un rationnel qui permet de prédire les impacts et les résultats qui découleront du projet, et ce, basé sur une bonne compréhension du problème à résoudre. C’est un bon exercice qui leur demandera de bien réfléchir au problème et à la meilleure solution.
Le temps presse, les organisations RH performantes se rendent bien compte qu’il ne suffit pas d’avoir une équipe d’analytique RH forte. La fonction RH fait face à une révolution et l’on peut s’attendre qu’un jour les professionnels RH seront aussi confortables avec les chiffres que n’importe quel autre groupe. Pour y arriver, vous devez commencer maintenant avec des projets concrets qui permettront à votre équipe de se développer.
Source 1. : People analytics : scaling capabilities, Bersin, Deloitte Consulting /Madhura Chakrabarti, PhD, 2017.
Détentrice d’un baccalauréat en génie mécanique et d’un MBA en gestion des opérations de l’Université Laval.
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