L’EDI, Trump et nous

Depuis l'élection de Donald Trump et l’annonce de plusieurs de ses mesures en défaveur de l’inclusion, un vent de panique et de tristesse s’est installé dans la communauté de personnes prônant l’EDI partout dans le monde. Plus près de chez nous, la situation a provoqué diverses réactions contrastées parmi les entreprises américaines, québécoises et canadiennes. Certaines ont choisi de réduire ou d'abandonner ces initiatives, tandis que d'autres les ont maintenues, convaincues de leurs bienfaits.

Entreprises délaissant les politiques EDI 

Aux États-Unis, l’administration Trump a dénoncé les programmes EDI, jugeant qu’ils mènent à la division et qu’ils sont contraires à l’unité nationale. Cette opposition a poussé certaines entreprises, notamment celles dépendant de contrats fédéraux, à revoir ou à abandonner leurs initiatives en matière de diversité. Des géants technologiques ont ainsi réduit leurs programmes pour se conformer aux nouvelles directives. En plus de la crainte de perdre des contrats, la volonté de plaire à la nouvelle administration et celle de se soustraire à des poursuites judiciaires possibles font également partie des éléments ayant contribué à ces décisions désarmantes. Par ailleurs, certaines entreprises considèrent que ces programmes pourraient aller à l’encontre de la méritocratie en favorisant certains groupes au détriment d’autres.(1) 

La méritocratie, concept prôné par l'administration Trump, met l'accent sur la récompense des individus en fonction de leur talent et de leurs réalisations, indépendamment de leur origine ou de leur identité. Cette approche a conduit certaines entreprises à privilégier des politiques basées uniquement sur la performance individuelle, au détriment des initiatives visant à promouvoir l’équité, la diversité et l'inclusion.(2) 

Il est important de noter que des entreprises avaient déjà commencé à réduire leurs initiatives EDI avant l'élection de 2024. Les raisons invoquées incluent des préoccupations concernant l'efficacité de ces programmes, des pressions financières ou des changements dans les priorités stratégiques.  

Entreprises maintenant leur engagement envers l'EDI 

À l'inverse, d’autres entreprises américaines ont choisi de maintenir, voire de renforcer leurs politiques EDI, convaincues de leurs avantages pour l'organisation. Des entreprises comme JPMorgan Chase(3) et Costco(4) ont continué à investir dans des programmes de diversité et d'inclusion, estimant qu'une main-d'œuvre diversifiée favorise l'innovation, améliore la performance globale et reflète mieux la clientèle qu'elles servent. Ces entreprises s'appuient sur des données probantes montrant que la diversité en milieu de travail est associée à une meilleure performance financière, à une plus grande satisfaction des équipes et à une image de marque positive. Elles considèrent que les initiatives EDI sont essentielles pour attirer et retenir les talents dans un marché du travail compétitif. Toutefois, certaines entreprises ont changé leurs discours et leurs communications autour du sujet, préférant adopter un ton plus modéré, tout en maintenant et protégeant leurs initiatives EDI.  

Impact au Canada et au Québec 

Au Canada et au Québec, les réactions des entreprises aux politiques EDI ont été moins influencées par l'administration américaine et davantage guidées par les valeurs locales. Le Canada et le Québec ont une tradition de promotion du multiculturalisme et de l'inclusion. Ainsi, pour l’instant, il ne semble pas y avoir de mouvement de désaveu flagrant de l’EDI dans les entreprises canadiennes ou québécoises comme on le voit aux États-Unis. Mais, étant donné que les États-Unis peuvent exercer une influence sur la politique canadienne, en cette période préélectorale et quelque peu confuse au niveau politique, plusieurs personnes de la population canadienne et québécoise vivent une inquiétude face à l’avenir de ces mesures dans les organisations et dans la sphère sociale. Est-ce que les entreprises d’ici ayant des relations commerciales avec des entreprises américaines qui ont renoncé aux valeurs EDI se sentiront dans l’obligation de renoncer ou de réduire leurs mesures d’équité, de diversité et d’inclusion pour conserver leur clientèle américaine? 

Et l’avenir? 

Il faut espérer que les entreprises québécoises et canadiennes resteront fidèles à leurs valeurs et ne céderont pas à la peur des répercussions liées aux politiques de Donald Trump. Face aux pressions extérieures, elles doivent s’appuyer sur leurs convictions et reconnaître que l’équité, la diversité et l’inclusion ne sont pas seulement des principes éthiques, mais aussi des leviers essentiels pour l’innovation, la performance et la cohésion sociale. En maintenant leur engagement, elles enverront un message fort : celui d’un monde des affaires qui refuse de reculer devant l’intimidation et qui choisit de bâtir un avenir plus inclusif.