Développement organisationnel et expérience employé
Dans les dernières semaines, on ne compte plus les annonces des mises à pied et de suppressions de poste. En plus des fermetures de PME qui semblent augmenter, plusieurs grands joueurs dans les technologies, le secteur bancaire, les communications ou encore le transport (pour ne nommer que ceux-là) semblent eux aussi emboîter le pas. Personne ne s’en surprend puisque les commentateurs de la scène économique nous prédisaient un ralentissement économique depuis des mois. Mais voilà, les pertes d’emplois arrivent au moment où l’économie semble reprendre son souffle, alors comment expliquer la situation actuelle et surtout, quel rôle peuvent jouer les équipes de ressources humaines?
Les diminutions d’effectifs annoncées n’ont pas toutes les mêmes origines. Les entreprises du secteur bancaire, des technologies de l’information et des communications sont en transformation. Elles subissent certes l’impact du ralentissement économique, mais c’est un phénomène mineur comparativement aux profondes transformations structurelles des modèles d’affaires de ces organisations. Le ralentissement économique, c’est le coup de grâce et l’éléphant dans la pièce, c’est bien entendu la transformation numérique et l’arrivée de l’intelligence artificielle. Avec la digitalisation des transactions et l’automatisation des multiples tâches, les besoins de main-d’œuvre ne sont plus les mêmes. Pensez-y, aujourd’hui, on achète de l’assurance en ligne, on magasine des hypothèques en ligne, on fait des transactions en ligne et on place son argent en ligne. Avec l’intelligence artificielle, votre dossier va être analysé par une machine, des conseils vous seront prodigués par une machine, et c’est une machine qui répondra à vos questions (c’est déjà le cas avec les chatbots). Il était évident que cela finirait par affecter les emplois du secteur bancaire. Les mises à pied ne sont donc pas vraiment liées au ralentissement économique et les emplois perdus ne seront pas remplacés, en tout cas pas par les mêmes emplois. Et quand on dit que des emplois technos seront créés par les nouvelles technologies, c’est vrai, mais à court terme, même les compagnies en techno suppriment des postes.
Dans les commerces, on assiste aussi à un double effet, celui du ralentissement de la consommation combiné à l’avènement des achats en ligne, le tout propulsé par la COVID et aggravé par la pénurie de main-d’œuvre. Là non plus, les emplois perdus ne seront pas remplacés tels quels. De nouveaux emplois naîtront dans ces secteurs emplois et exigeront de nouvelles compétences.
Dans le secteur manufacturier en revanche, c’est davantage le ralentissement de la consommation qui est le grand responsable des mises à pied… lesquelles ne sont à l’heure actuelle pas si nombreuses comparativement à celles engendrées par les transformations numériques.
On comprend donc que les stratèges en ressources humaines doivent plus que jamais cesser de focaliser sur l’interne et davantage observer les dynamiques économiques, environnementales, sociales et politiques qui peuvent avoir un impact sur leurs opérations. Pour être en mesure d’influencer et de contribuer à l’atteinte des objectifs stratégiques de l’entreprise, les équipes de ressources humaines doivent contribuer à l’identification des risques externes.
À l’interne, grâce à l’analytique RH, aux tableaux de bord et aux différents portraits de situation (sondages, diagnostic, mesure des compétences, etc.) que l’on peut réaliser, on est aujourd’hui en mesure d’identifier les actions à mettre en œuvre pour améliorer l’efficience organisationnelle et tendre vers l’atteinte des objectifs. Il faut cependant aussi identifier les menaces et opportunités externes, surtout dans des environnements changeants tels que ceux que nous connaissons actuellement.
1. Les enjeux de recrutement qui ne cesseront pas du jour au lendemain. Même si l’économie ralentit et se transforme, l’écart entre les besoins de main-d’œuvre et la disponibilité des travailleurs (en volume et en compétences) est tellement important que nous risquons de retombé en problématique majeure de pénurie aussitôt que les indices économiques se redresseront.
2. L’avènement de l’intelligence artificielle va entraîner un désalignement entre les compétences disponibles et les besoins des entreprises. Un volume important de main-d’œuvre, 60% des emplois qualifiés dans les économies avancées seront impactés, selon la présidente du FMI. À moyen et long terme, cela créera de nombreux nouveaux emplois, mais à court terme, cela engendrera d’importantes pertes d’emplois.
3. L’instabilité géopolitique et environnementale. Qu’il s’agisse de guerres, de changements de gouvernement dans les pays voisins ou encore, d’environnement les économies vont recentrer sur leurs productions et leur consommation locales.
Et ce ne sont là que quelques-unes des tendances qui auront un impact sur nos organisations alors, comment s'y préparer?
En observant la démographie, il est évident que dans les prochains mois nous allons encore vivre avec des enjeux de talent. Cependant, il est également clair que nous devons faire évoluer notre main-d’œuvre, car à l’avenir, ce ne seront pas les mêmes compétences qui seront mises à profit. En ce sens, nous devons élargir notre regard sur la formation, nous assurer de faire évoluer les compétences de nos équipes pour faire face aux défis d’aujourd’hui, mais également de demain.
Emilie est cofondatrice et rédactrice en chef du e-magazine FacteurH.com ainsi qu'animatrice de l'émission Web VecteurH.
Didier Dubois a cofondé HRM Groupe en 2006 qui s'est joint à Humance en 2023.
Facteur H est un espace convivial de référence francophone en ressources humaines pour rester à l’affût des nouvelles tendances et trouver des solutions concrètes et applicables aux défis organisationnels d’aujourd’hui et de demain.