Immigration, diversité et inclusion
Chaque année, le Canada accueille un nombre important de nouveaux immigrants en provenance de partout dans le monde. En moyenne, 255 000 immigrants entrent au pays et au-delà de 50 000 nouveaux arrivants s’installent au Québec.
À leur arrivée au Canada, les gens venus d’ailleurs semblent en excellente santé. Mais on a remarqué un gradient important entre les problèmes de santé chronique et la santé des immigrants : cette dernière se détériore progressivement quand la durée de résidence de ces immigrants au Canada s’allonge. Tant chez les hommes que chez les femmes, la déclaration d’un problème de santé chronique, par rapport aux non-immigrants, augmente de façon régulière dans tous les groupes d’immigrants.
Pour diverses raisons, ces nouveaux arrivants encourent le risque d’une détérioration de leur santé. Le processus d’immigration est stressant et perturbant. Il s’accompagne souvent de contraintes financières, de perte d’emploi et du réseau de soutien (famille, amis), autant de facteurs susceptibles de nuire à leur santé. Dès leur arrivée, ces nouveaux migrants font face à d’autres problèmes : déqualification, baisse du niveau socioéconomique, nouveau mode de vie à apprivoiser, précarité d’emploi, discrimination et j’en passe. On considère la perte du réseau de soutien comme un facteur de risque considérable quant à l’état de santé. Selon les récentes données de l’Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP), les immigrants seraient deux fois plus susceptibles que les citoyens canadiens de naissance d’indiquer une détérioration de leur état de santé. Étonnamment, même les immigrants de longue date sont plus susceptibles qu’eux d’indiquer que leur état de santé est passable ou mauvais.
La prévalence des problèmes de santé chroniques chez les nouveaux arrivants est nettement moins élevée que celle observée parmi la population née au Canada. Pourtant, au fil du temps, l’état de santé de ces nouveaux immigrants tend, tôt ou tard, à se dégrader. Ce phénomène semble associé au gain de poids et à l’inactivité physique. Cette détérioration, plus fréquente chez les femmes, se manifeste principalement par une prise de poids pouvant aller jusqu’à quatre à cinq kilos par année. Cette caractéristique est très forte dans les communautés du Maghreb et du sous-continent indien.
Plusieurs facteurs expliquent cette situation, dont une inadaptation au climat et une diminution du temps libre et du temps réservé à la préparation des repas. Les priorités de trouver un travail, un foyer convenable et de bien s’installer dans leur pays d’adoption les accaparent. De plus, la saison froide a un impact considérable sur la pratique de leurs activités physiques : plusieurs qui arrivent de pays tropicaux sortent et bougent peu en hiver.
Les expatriés qui s’intègrent moins bien, de façon générale, souffrent davantage d’insécurité alimentaire et subissent plus de stress et d’épisodes dépressifs. D’où un état de santé à la dérive. À l’opposé, les immigrants qui s’intègrent le mieux à la société d’accueil ont un état de santé supérieur à leurs pairs… et même aux Canadiens de naissance ! Si on s’intègre en accédant au marché du travail, en participant à des activités culturelles hors de sa communauté, et en apprenant le français, on risque beaucoup moins de souffrir de problèmes de santé mentale et physique.
Une problématique notoire qui frappe les immigrants est l’adaptation de leurs pratiques alimentaires à un nouvel espace où les cuisines, les commodités, les circuits d’approvisionnement, les réseaux sociaux, culturels et économiques sont différents. D’un pays à l’autre, les habitudes alimentaires, les modes de cuisson, de préparation, d’hygiène, de conservation, d’achat et d’organisation culinaire se distinguent incroyablement. Pour certains, s’adapter à ce nouvel environnement alimentaire se révèle un défi de taille.
S’adapter à un nouveau monde, une toute nouvelle réalité, n’est guère facile. Malheureusement, certains tentent le coup au détriment de leur santé. En tant qu’individu mais surtout en tant qu’entreprise, agissons collectivement pour faciliter l’intégration sociale autant qu’alimentaire des immigrants. Ateliers culinaires en entreprise, jumelage d’employés d’ici et d’ailleurs, activités interculturelles, accompagnement individualisé : les possibilités sont immenses pour faire de votre environnement de travail un milieu équitable, diversifié et inclusif. Un milieu où chacun se sent à sa place, heureux de développer un sentiment d’appartenance à la société québécoise et à l’entreprise dans laquelle il a choisi de s’investir.
Offrons une place de choix à ces citoyens qui viennent enrichir notre société. Nous en sortirons tous gagnants.
Marianne Lefebvre est nutritionniste spécialisée en nutrition internationale et membre de l’Ordre des diététistes-nutritionnistes du Québec. Elle se concentre depuis 15 ans sur la santé des Néo-Canadiens et des Canadiens avec une approche interculturelle à travers des organisations et des entreprises.
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