Quand j’ai débuté ma carrière comme médecin du travail, il y a de cela une trentaine d’années, il m’est arrivé plus d’une fois d’entendre un-e chef-fe d’entreprise affirmer avec conviction : « Les problèmes de santé mentale, ça n’existe pas dans mon organisation ». C’est un fait qu’à l’époque, de nombreux-ses dirigeant-e-s et employé-e-s considéraient qu’un-e employé-e qui quittait avec un diagnostic de dépression ou d’épuisement professionnel était, au fond, simplement une personne paresseuse.
Au tournant des années 80, le stress, que l’on qualifiait alors de « mal du siècle » était pourtant une réalité et un enjeu bien connu en milieu de travail. Les entreprises ne reconnaissaient, toutefois, aucune responsabilité face au stress vécu par leur personnel. Les personnes victimes de ce mal insidieux étant perçues comme des êtres faibles ou incapables de gérer leur stress.
Au tournant du siècle, en plus d’avoir eu à affronter le bogue de l’an 2000, les entreprises ont été obligées de reconnaître que leurs pratiques organisationnelles et leurs pratiques de gestion étaient responsables d’une grande partie du stress vécu par leurs employé-e-s.
Les milieux de travail ont alors commencé à prendre conscience de ce que la science avait pourtant clairement démontré depuis longtemps, soit l’impact négatif sur la santé de certains facteurs tels que la surcharge de travail, le manque de reconnaissance, d’autonomie décisionnelle et de soutien social, et d’autres facteurs qu’on appelle « risques psychosociaux ».
En 2023, il est devenu difficile pour un employeur d’affirmer que les problèmes de santé mentale n’existent pas dans son organisation quand on constate que :
Plus récemment, en 2021, la modernisation du régime de santé et sécurité au travail oblige désormais tous les employeurs du Québec à mettre en place un plan ou un programme de prévention qui, très bientôt, devra inclure les risques psychosociaux.
Bien que plusieurs milieux de travail voient cette obligation uniquement comme une contrainte et un fardeau réglementaire additionnel, les organisations les plus proactives n’ont pas attendu la législation pour agir. Elles ont compris que le moment était propice pour le faire en raison notamment du fait que la santé mentale, jadis un sujet tabou, l’est aujourd’hui de moins en moins.
Elles ont aussi compris qu’agir était bénéfique pour leur personnel et pour l’organisation.
Parmi les entreprises qui n’ont pas attendu pour agir, il y a toutes celles qui ont mis en place une démarche de type « Entreprise en santé » (3), proposée par la norme du même nom. Une des exigences de cette norme, publiée en 2008 et mise à jour en 2020, est de mettre en place une méthode pour identifier et contrôler les risques physiques et psychologiques du milieu de travail.
De plus, la norme invite les organisations à valider les besoins de leur personnel et à agir dans les 4 sphères d’interventions suivantes : habitudes de vie, conciliation travail/vie personnelle, environnement de travail et pratiques de gestion.
Les pratiques de gestion identifiées dans la norme incluent :
Lorsqu'elles sont présentes, ces pratiques de gestion sont favorables à la santé mentale du personnel et elles constituent des facteurs de protection. Toutefois, quand elles sont absentes ou déficientes, elles mettent la santé mentale à risque et constituent alors des facteurs de risques psychosociaux.
Facteur H est un espace convivial de référence francophone en ressources humaines pour rester à l’affût des nouvelles tendances et trouver des solutions concrètes et applicables aux défis organisationnels d’aujourd’hui et de demain.