Le rapport au travail a profondément évolué depuis la crise de la Covid, engendrant des attentes de plus en plus polarisées. Pour certaines personnes, il est une source d’aliénation et de frustration, tandis que pour d’autres, il représente un moyen d’épanouissement, tant professionnel que personnel. À ce titre, la place du travail dans nos vies demeure largement façonnée par notre vision de la société.
Et si la clé pour réconcilier ces perspectives divergentes résidait dans un équilibre subtil des forces? Entre droits et devoirs, ce que l’on donne et ce que l’on reçoit, réalisation de soi et contribution au collectif, quête de sens et besoin de reconnaissance, plaisirs et contraintes. Dans un monde en perpétuelle mutation, où les normes sont sans cesse remises en question, que peut-on encore attendre du travail?
La première attente est un salaire juste, c’est-à-dire en adéquation avec le marché et la valeur propre de l’individu, cette dernière étant la combinaison subtile de compétences, de responsabilités, d’expériences et de rareté sur le marché. Il s’agit d’une certaine façon de la base de la pyramide de Maslow appliquée au travail : un besoin primaire, celui de la sécurité financière, pour tout le monde, ou presque.
Recommandation : mettre en place une transparence des fourchettes de rémunération par emploi.
La seconde attente est de pouvoir apprendre et progresser. Les personnes salariées souhaitent se développer professionnellement, acquérir de nouvelles compétences et évoluer dans leur carrière.
Recommandation : favoriser un système 80/20, où 80 % des activités sont consacrées à des tâches maîtrisées (avec un objectif de performance) et 20 %, à des tâches nouvelles (apprentissage, sans pression de résultat immédiat).
Nous avons un besoin fondamental de lien social. Le télétravail a mis en évidence l’importance des bureaux en tant que lieux de socialisation. Créer un sentiment d’appartenance est essentiel, même si cela peut parfois entrer en tension avec la reconnaissance des individualités, accentué par le processus d’individuation.
Recommandation : planifier des événements de « team building » et de convivialité sur toute l’année pour garantir une participation optimale.
Beaucoup de gens souhaitent que leur travail ait un impact positif, qu’il contribue à quelque chose de plus grand qu’eux. Ce besoin ne nécessite pas toujours d’être dans une entreprise à mission, mais demande une communication transparente sur l’impact réel de l’entreprise.
Recommandation : éviter le « washing » (« greenwashing », « socialwashing »…), qui pourrait créer l’inverse de ce que vous recherchez…
L’autonomie au travail est une attente forte, souvent mise en tension avec le besoin de contrôle de quelques managers. Les règles du jeu doivent être claires : jusqu’où s’étendent les marges d’autonomie, quelles sont les contraintes et comment équilibrer suivi et confiance?
Recommandation : fixer des objectifs précis et mesurables pour évaluer le travail sur la base des résultats et non du temps de présence, notamment en télétravail.
Pour certaines personnes, le travail représente une quête de pouvoir et de prestige, un moyen d’affirmer leur statut dans la société. Pour d’autres, c’est un moyen de s’élever socialement, d’améliorer leur condition et de créer des opportunités pour l’avenir. Le travail joue ainsi un rôle identitaire majeur, que ce soit pour perpétuer une tradition familiale ou, au contraire, pour s’en affranchir et créer sa propre voie. Cela explique pourquoi la première question que l’on nous pose souvent est « Que fais-tu dans la vie? », car la réponse est perçue comme une manière de définir qui nous sommes dans le contexte social.
Recommandation : inciter chaque individu à interroger ses motivations profondes et à écrire sa propre histoire, en dehors des attentes externes ou des pressions sociales.
Le sens au travail est une attente universelle, mais subjective. Il découle de plusieurs dimensions : la direction (dans quel sens allons-nous?), la signification (ce que ce travail représente pour nous) et l’alignement avec nos valeurs.
Finalement, le sens au travail regroupe plusieurs des attentes. Appartenir à un collectif n’a-t-il pas déjà du sens? Tout comme contribuer à la vie de la cité, peu importe notre métier? Collaborer, faire société. Se développer, grandir. Trouver du sens dans le travail bien fait. Dans un objectif atteint en fin de trimestre. Dans la transmission d’un savoir ou d’une méthode à un nouvel arrivant. Dans l’identification et la résolution d’un conflit entre collègues…
Ainsi, le sens du travail se tisse à travers ces multiples dimensions, façonnant notre expérience professionnelle et contribuant à la construction de notre identité.
La crise de la Covid a accéléré les questionnements sur la place du travail dans nos vies. Les attentes évoluent, en particulier chez les nouvelles générations, et elles appellent à un rééquilibrage. Pour éviter un désengagement massif, il y a une nécessité pour les entreprises de redéfinir un « New Deal », clarifiant les attentes réciproques entre employeurs et leurs équipes.
Un équilibre est possible. Il repose sur une répartition juste entre droits et devoirs, individu et collectif, épanouissement personnel et contribution au bien commun. Un « New Deal » pour réconcilier les contraires et dépasser les clivages historiques sur notre perception du travail.
Facteur H est un espace convivial de référence francophone en ressources humaines pour rester à l’affût des nouvelles tendances et trouver des solutions concrètes et applicables aux défis organisationnels d’aujourd’hui et de demain.